MARSYAS (PEINTRE DE)

MARSYAS (PEINTRE DE)
MARSYAS (PEINTRE DE)

MARSYAS PEINTRE DE (mil. à 3e quart \MARSYAS (PEINTRE DE) IVe s.)

Le peintre que l’on désigne sous le nom conventionnel de Peintre de Marsyas est un des rares artistes dignes de ce nom, une des rares personnalités affirmées, parmi les décorateurs de vases attiques à figures rouges du \MARSYAS (PEINTRE DE) IVe siècle. En effet, à la suite de la défaite subie par Athènes en \MARSYAS (PEINTRE DE) 404, à la fin de la guerre du Péloponnèse, les exportations de céramique attique faiblirent et l’activité des ateliers connut un déclin notable, à la fois en quantité et en qualité, d’autant plus que des centres de fabrication nouveaux et concurrents produisaient désormais, en Grande-Grèce (Sicile et surtout Italie méridionale), des vases à figures rouges d’un niveau comparable à celui de la céramique d’Athènes. Un style «fleuri» abâtardi se prolongea jusqu’aux environs de \MARSYAS (PEINTRE DE) 370, avec une fâcheuse tendance au relâchement du dessin, à la surcharge dans la composition et à l’emploi surabondant de rehauts blancs ou bleus et de dorure, souvent en relief. Dans le courant du deuxième quart du siècle, cependant, se produisit une sorte de renaissance, éphémère mais incontestable, avec la réapparition d’une céramique au décor soigné, à nouveau appréciée par des acheteurs étrangers et décorée selon un style que l’on nomme justement «style de Kertch», d’après le nom moderne de la ville de Crimée, en Russie méridionale, près de laquelle un grand nombre de ces vases ont été découverts, exportés qu’ils avaient été vers la région de l’antique colonie milésienne de Panticapée. Ce style de Kertch dura environ un demi-siècle, jusqu’à la disparition définitive de la céramique attique à figures rouges, vers \MARSYAS (PEINTRE DE) 310. Il connut son apogée vers \MARSYAS (PEINTRE DE) 360-\MARSYAS (PEINTRE DE) 340, avec notamment le Peintre de Marsyas.

Alors que la production céramique du \MARSYAS (PEINTRE DE) IVe siècle tend à devenir un art industriel, le Peintre de Marsyas est resté un artisan, auquel on n’a pu attribuer à ce jour que huit vases entiers (en comptant une hydrie d’une collection privée de Marseille publiée par F. Salviat, «Une hydrie nouvelle du Peintre de Marsyas», in Bulletin de correspondance hellénique , no 98, 1974) et, au total, pas plus d’une dizaine d’œuvres (en prenant en considération deux autres vases fragmentaires). Le Peintre est ainsi nommé d’après le sujet d’une pélikè (sorte d’amphore) décorée par lui et conservée à Saint-Pétersbourg: sur une des faces de ce vase apparaissent Apollon, jouant de la cithare, et le satyre Marsyas, tenant la flûte et prêt à rivaliser avec le dieu dans le domaine musical.

Le Peintre de Marsyas traite des sujets correspondant au goût et à la sensibilité du jour, dans lesquels les personnages féminins — déesses ou simples mortelles — jouent un rôle de premier plan. Quelques tableaux sont inspirés par la mythologie: Dionysos entouré de son thiase (satyres et ménades), jugement de Pâris, attaque galante de la Néréide Thétis par le héros Pélée, Triptolème aussi, sans oublier Apollon et Marsyas; d’autres vases présentent de simples mortelles dans des scènes de genre: toilette, habillage, offrande de cadeaux à la mariée. Les corps sont tantôt nus, tantôt drapés dans des robes ou des manteaux aux plis délicats, selon un dosage harmonieux. Les personnages sont nombreux, en majorité féminins, et ils sont souvent accompagnés, selon les habitudes de l’époque, de petits Amours ailés qui volettent auprès d’eux.

Malgré cette relative densité des personnages, qui remplissent presque la totalité de la surface à décorer, la composition reste toujours claire et nette. Grâce à l’utilisation bien choisie de rehauts blancs qui recouvrent le corps de certains personnages (en particulier les petits Amours et quelques femmes nues), le Peintre de Marsyas sait créer un équilibre fondé sur la symétrie par rapport à un axe (comme sur la face de la pélikè du British Museum qui représente Thétis et Pélée au milieu des compagnes effrayées de la jeune Néréide), ou sur la répétition de personnages, ponctués par de petits Amours blancs et aux attitudes variées dans le détail (ainsi sur le lébès gamikos — sorte de chaudron à pied que l’on offrait comme cadeau de noces — du musée de l’Ermitage, à Saint-Pétersbourg). Cette couleur blanche, parfois accompagnée d’un peu de bleu, de brun ou de rouge, apporte en outre une lumière qui ajoute à l’attrait décoratif du dessin.

Car le Peintre de Marsyas, contrairement à beaucoup de ses contemporains, est un dessinateur de talent, attaché à la qualité du dessin jusque dans le détail (par exemple les mains et les pieds). Les lignes sont souples mais nettes, les traits gracieux mais fermes, dans la tradition des artistes de la seconde moitié du \MARSYAS (PEINTRE DE) Ve siècle. Ainsi, pour le dessin des draperies, il procède à la fois par lignes suivies et par lignes discontinues ou interrompues, ces dernières venant indiquer avec naturel le détail des plis à l’intérieur de contours très nets; et dans le rendu de ces plis, il sait toujours éviter la surcharge inutile. Selon la tradition de bien des peintres de vases attiques à figures rouges du siècle précédent, il n’est guère intéressé par les innovations qu’ont introduites les maîtres de la grande peinture et que certains peintres de vases ont essayé d’imiter (par exemple la recherche du rendu de la perspective). Il se contente d’étager ses figures en hauteur, dans une sorte d’effet d’apesanteur, en adaptant avec bonheur les attitudes des personnages à la forme convexe du support. Il suggère seulement les décalages de plans par des imbrications et des chevauchements partiels des corps ou des draperies, mais il n’éprouve guère le besoin d’introduire des représentations de bâtiments ou de meubles, dont il pourrait rendre la profondeur, comme le font par exemple beaucoup de peintres italiotes du \MARSYAS (PEINTRE DE) IVe siècle. Ce qui l’attire, c’est la représentation de l’être humain, des femmes en particulier, dont il apprécie et s’efforce de rendre la beauté plastique. On a pu voir en lui un «admirateur de Scopas» (J. Charbonneaux), le célèbre sculpteur contemporain, et comparer par exemple la Thétis nue de la pélikè de Londres déjà citée avec la Vénus du Capitole. On pourrait aussi songer à Praxitèle, le premier grand spécialiste du nu féminin. Quoi qu’il en soit, sous les traits du Peintre de Marsyas, les formes sont pleines, les différentes parties du corps gracieuses et harmonieuses, les attitudes toujours nobles et élégantes, le port à la fois souple et majestueux. L’expression des visages traduit des sentiments qui vont de la douceur à une certaine sévérité, en évitant la mièvrerie.

Dans le détail comme dans la composition d’ensemble, l’artiste sait trouver et conserver la juste mesure caractéristique du meilleur classicisme grec, et à travers son œuvre peu fournie mais si séduisante transparaît comme une nostalgie romantique de la grandeur et de la dignité de l’art du \MARSYAS (PEINTRE DE) Ve siècle, à un moment où la céramique attique à décor figuré, longtemps si florissante, touche presque au terme de son glorieux développement.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Нужна курсовая?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • CLÉOPHON (PEINTRE DE) — CLÉOPHON PEINTRE DE (actif CLÉOPHON (PEINTRE DE) 440 env. CLÉOPHON (PEINTRE DE) 410) Parmi les peintres de vases attiques de la seconde génération du style «libre», à l’époque où le premier classicisme atteint son apogée dans le domaine de la… …   Encyclopédie Universelle

  • Prix de Rome — Pour les articles homonymes, voir Prix de Rome (homonymie). Prix de Rome Palais M …   Wikipédia en Français

  • Apollon et Daphnis — Apollon et Marsyas ou Apollon et Daphnis Artiste Le Pérugin Année 1483 env Type huile sur bois …   Wikipédia en Français

  • Charles André van Loo — Carle van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles …   Wikipédia en Français

  • Le Primatice — Pour les articles homonymes, voir Primaticcio (homonymie). L Enlèvement d Hélène, 1530 1539 Francesco Primaticcio, dit …   Wikipédia en Français

  • Carle Van Loo — Charles André van Loo Carle Van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles Naissance 15 février …   Wikipédia en Français

  • Carle Vanloo — Charles André van Loo Carle Van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles Naissance 15 février …   Wikipédia en Français

  • Charles-André Van Loo — Carle Van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles Naissance 15 février …   Wikipédia en Français

  • Charles-André Vanloo — Charles André van Loo Carle Van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles Naissance 15 février …   Wikipédia en Français

  • Charles-André van Loo — Carle Van Loo Portrait de Carle van Loo en 1764, par Louis Michel van Loo, Château de Versailles Naissance 15 février …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”